Mystère et boule de poils

Mes amis, je vais avoir besoin de votre sagacité pour résoudre un mystère incroyable !
Figurez-vous que la semaine dernière je me rendais tranquillement au jardin pour nettoyer un peu les massifs desséchés par l’été… Enfin, plus exactement, je me dépêchais en pensant à l’énormité de la tâche qui m’attendait, des sacs sous le bras, sécateur et outils dans une main, piquets et cordons dans l’autre…  Après quelques ajustements et coupes d’herbe sous le figuier, juste de quoi remplir un énorme sac, je suis descendue au potager, apercevant au loin de nombreuses tiges des topinambours couchées dans l’allée. Il était temps de les tuteurer pour qu’elles retrouvent un peu d’allure et surtout pour que nous puissions passer sans réaliser une course de haies !
Commençant à planter deux pieux en bois avec de vigoureux coups de masse, en essayant de bien viser et d’éviter mes mains, j’attachais un bout de ficelle et je relevais  quelques plants écroulés.
Et c’est là, que je vis une feuille bizarre posée au sol au milieu des pissenlits. Mon cœur fit un tour sur lui-même… C’était une toute petite queue rousse, sectionnée, toute plate, ébouriffée…  Je m’emballais ! Mon rouquin facétieux qui venait chercher des noix ! Je l’avais vu deux jours plus tôt traverser la pelouse. Oh non, cela ne pouvait pas être lui !…

En soulevant avec précaution les autres branches, je le vis, gisant un peu plus loin… J’étais tellement désolée… En m’approchant, je trouvais son corps étrange ! Il avait de longues pattes sans poils. Et en y regardant de plus près, une grande queue fine. Un rat des champs, pas un écureuil !

Je n’y comprenais rien.  Il fallait que j’aie de l’aide, et un seul pouvait résoudre cette énigme.
« Bonjour Monsieur Poireau, je suis désolée de vous déranger pendant votre sieste, mais c’est important. »
Hector redressa la tête brusquement, l’air peu engageant et en me dévisageant des pieds à la tête.
«Mon petit, sachez que je ne dors pas, je réfléchis. Que puis-je pour vous ? Et d’abord, asseyez-vous, vous me faites de l’ombre. »
J’obtempérais et lui racontais la découverte qui me perturbait tant. Il écoutait attentivement.
« On voit que votre absence a été prolongée, vous avez négligé de venir entretenir les légumes cette semaine. Car il y a déjà deux jours que le drame s’est produit. »
Ainsi, Hector Poireau, notre détective nature était au courant. .. Je me sentais un peu coupable d’avoir délaissé ainsi mes amis…
Il bomba un peu le plastron pour se donner de l’importance, toussota, et continua :
« A la tombée de la nuit, avant-hier, j’ai entendu des cris et un remue-ménage incroyable. Mais avec vos massifs en pagaille, je n’ai rien pu voir. C’était dantesque, une bagarre féroce entre plusieurs animaux, une armée sauvage sans pitié, une horde en délire qui soufflait, haletait, revenait à la charge. Puis le silence, pesant, insoutenable  qui enveloppe les âmes  d’une guerre sans merci. »
Quelle envolée lyrique digne de Victor, euh non Hector ! Mais la réalité est bien plus sombre puisqu’il y a bien une victime ! Et peut-être même plusieurs !
Je me hasardais  à poser une question, un peu théâtralement :
« Monsieur Poireau, le petit rat est mort ! Mais qui l’a tué ? Pas l’écureuil, c’est une petite bête bien paisible incapable de se défendre… »
Il me regarda avec commisération et un peu d’agacement.
« Mais dans quel monde vivez-vous ? Voyons, la nature est quelquefois terrible, et chacun lutte pour sa survie… L’écureuil n’est pas une «  petite bête paisible », à part dans vos livres ! Il a un caractère
bien trempé, il est agité et quelquefois hargneux lorsqu’il est en colère et s’il a peur, il peut se déchainer ! »

J’ai du mal à y croire. Confondrait-il avec un ours mal léché ? Quoique pour l’instant, aucun ours n’a été signalé dans le village ! Pourtant, un vague souvenir remonte dans mon cerveau embrumé. Il me semble que dans un livre pour enfant  j’avais lu effectivement que la petite boule de poils n’avait pas très bon caractère et qu’il pouvait être vindicatif.

Donc, ses petites quenottes étaient bien armées pour casser des noisettes, mais aussi …. Euh, pourrait-il tuer un assaillant ? Et cette queue rousse ? Est-elle à lui ?
Je fis part de mes réflexions à Hector qui sembla  plongé dans un profond sommeil… Non, non, il médite, cogite, étudie, gamberge, examine… Bref il pense !
« Mon petit, vous vous doutez bien que j’ai mon idée sur la question… Et je vous laisse le soin de trouver la solution de ce mystère. Bonne chance ! »

Et Hector arbore son sourire narquois, très content de lui…

Mes amis, je compte sur vous pour m’aider à résoudre cette énigme. Donnez-nous votre version... Que s’est-il passé ?