Requiem pour un Noyer

Publié le par Eve

Requiem pour un Noyer

Il était une fois  …. Non, ce n’est pas un conte mais une histoire vraie !

En venant pour la première fois sur le terrain de notre future maison, je regardais les environs, les collines devant nous, l’herbe haute qui gênait notre marche. Et tout de suite je l’ai vu ! Lui… Le noyer qui était là certainement depuis des dizaines d’années. Je suis allée le saluer et me présenter, heureuse que ce bel arbre nous accueille bientôt.  Il ne ferait pas partie du jardin car il se dressait juste à la limite tracée par le géomètre. Il avait l’air bien vieux mais des noix pendaient au bout des branches. J’en ramassais quelques-unes à terre. En dégustant mon butin le soir, je fis une énorme grimace, elles étaient très amères. Donc, pas de récolte à prévoir, ce sera pour les écureuils ….

Requiem pour un Noyer

Mais lorsque nous sommes revenus au printemps pour contrôler l’avancée des travaux, je constatais que les feuilles n’apparaissaient pas sur les branches. Rien, pas de bourgeon… Et les semaines suivantes, toujours rien. Il était mort pendant l’hiver. Cela m’attrista énormément. Il n’avait pas souhaité vivre auprès de nous.
Malgré tout, il me parut magnifique. Son port majestueux semblait encore plus élancé vers le ciel. Il étirait ses branches tortueuses et son écorce se détachait dans la lumière lorsque le soir les rayons rouges du soleil descendaient à l’horizon et enflammaient les paysages. Je l’ai admiré si souvent.
Lorsque le froid revint, nous avons posé des mangeoires. Et ce fut extraordinaire.  Tour à tour, les mésanges, les moineaux se posaient sur ses branches puis sautillaient de l’une à l’autre avant de plonger pour prendre une graine et remonter aussi rapidement.  Un manège incessant. En fin d’après-midi, une pie venait se toiletter, perchée tout en haut.

Requiem pour un Noyer

Je remarquais aussi que les vieux arbres servent de refuges à de nombreuses espèces. Des insectes, et une petite faune variée. Le noyer ne faisait pas exception et offrait certainement le gîte et le couvert. Son tronc plein de trous laissait entrevoir des cachettes merveilleuses.  Peut-êtr

Requiem pour un Noyer

Je lui parlais souvent lorsque les oiseaux s’absentaient. Régulièrement, quelques tronçons de branches se détachaient et tombaient dans la haie. Je les ramassais et les entassais pour les insectes.
En juin dernier, advint un très gros orage. Nuages noirs, bourrasques, vent, tonnerre, éclairs puis pluie violente mêlée de petits grêlons. Le calme succéda à cette mini tempête, le ciel se dégagea soudainement, laissant apparaitre un superbe arc-en-ciel. Que c’était beau ces couleurs qui nimbaient les branches du vieil arbre et auréolaient sa cime. Par réflexe (ou intuition ?),  je lui ai tiré le portrait…

Requiem pour un Noyer

Le lendemain matin, pendant que j’écrivais tranquillement un article pour PPP, un énorme bruit sur le chemin me fit sortir. Et ce fut la consternation.
Rien, il n’y avait plus rien…

Requiem pour un Noyer

Un coup de tronçonneuse…. Et le vide. Le noyer gisait, encore plus immense couché, géant terrassé.
« Il perdait ses branches  et c’était dangereux lorsque nous passions en voiture …. » !
Je n’avais pas pu lui dire au revoir, le remercier pour sa beauté et son utilité. Alors doucement je m’approchais au milieu du tumulte et du danger des engins qui s’agitaient pour le découper … Et je posais ma main sur le tronc dans un ultime adieu.
Merci pour ce que tu as été et tout ce que tu nous as apporté.

Requiem pour un Noyer

Pour en savoir plus :

1 Reconnaître le noyer
C’est un arbre très solitaire qui a besoin d’énormément d’espace et de lumière. Il est de grande taille et peut atteindre 25 à 30 mètres de haut. Il donne un bois extrêmement dur, très apprécié en ébénisterie.
Le noyer atteint sa maturité entre 25 et 40 ans et peut vivre jusqu’à 400 ans.

  • Les feuilles
    Les feuilles du noyer sont composées en folioles. Mais, toutes les feuilles composées ne sont pas des feuilles de noyer !
    Le noyer a 5 à 9 folioles avec le terminal est plus grand. De plus, ces feuilles dégagent l'odeur très forte et particulière du noyer.
  • L'écorce
    Le noyer a une écorce gris clair. Plus l'arbre est vieux, plus son écorce est crevassée.
  • Les fleurs et les fruits
    Chez le noyer il y a des fleurs mâles et des fleurs femelles. Les fleurs mâles sont des chatons pleins de pollen. Les fleurs femelles sont fécondées par le vent. Elles gonflent progressivement entre le printemps et l'été pour donner le brou de noix. Ce fruit charnu renferme une noix composée d'une coquille en deux valves. La noix renferme une amande oléagineuse en deux parties. Chacune de ces parties est un cotylédon : la réserve de nourriture du jeune plant de noyer. C'est donc un fruit très riche en énergie en plus d'être très bon !

Le noyer peut fructifier pendant deux cent ans. On récolte ses noix à l’automne, de mi-septembre à fin octobre. L’endocarpe ou coquille, dure comme du bois, renferme deux cerneaux charnus en forme de petit cerveau.

Requiem pour un NoyerRequiem pour un Noyer

2 Où vit le noyer ?

Cet arbre aime les climats doux et chauds. Pendant les dernières glaciations, le noyer a fui le froid et s'est réfugié dans les Balkans, en Italie et dans la péninsule ibérique. Ensuite, favorisés par les humains, le noyer a petit à petit recolonisé l'Europe. Les romains ont planté beaucoup de noyers dans leur empire.
Le noyer est avec le figuier, l’arbre le plus anciennement cultivé. Ses origines sont assez mystérieuses, mais certains botanistes pensent qu’il est originaire de nos contrées et qu’il existe depuis l’ère tertiaire, soit depuis 45 millions d’années avant notre ère. Une noix de plus de 8 millions d’années a d’ailleurs été découverte lors de fouilles archéologiques en Ardèche !

3 Les usages du noyer

On consomme évidemment les noix en tant que telles. Mais, on en fait aussi une excellente huile. On peut aussi utiliser les noix encore vertes pour en faire du vin de noix ou de la liqueur.
Les tisanes et décoctions de ses feuilles sont utilisées pour calmer les saignements de nez et réguler la circulation sanguine.
Enfin, le bois très contrasté et veiné de rouge est une essence précieuse. C'est bois très tendre et donc facile à travailler. C'est le bois de rêve pour l'ameublement, la lutherie et l'ébénisterie.
Le brou de noix est en fait l’écorce de la noix aussi appelée épicarpe. Il contient des tanins et diverses substances chimiques dont la fameuse juglone.. Le brou vert de la noix noircit en tombant sur le sol car les tanins qu’il renferme s’oxydent rapidement. Il peut d’ailleurs teinter durablement les doigts, car ses composés tannent la peau ! Le brou de noix constitue ainsi un colorant naturel bien connu pour teinter les meubles. On peut même fabriquer de l’encre à partir de cette écorce.

4 Les compagnons du noyer

On voit souvent des écureuils et des geais qui mangent et enterrent des noix dans la forêt. Au printemps, les noix oubliées par ces jardiniers sauvages germent et donnent de nouveaux arbres. Le pic épeiche est aussi un grand consommateur de noix.

5 La symbolique du noyer

En latin, le noyer s'appelle Juglans regia. Juglans vient de jovis, un autre nom du dieu Jupiter. La noix symboliserait le gland de Jupiter. A l'époque romaine, c'était un arbre très hautement considéré. C'est pour cela que les romains l'ont planté tout autour du pourtour méditerranéen en compagnie des oliviers et des vignes.

Les histoires autour de cet arbre sont contrastées. On dit que son ombre est maléfique, peut-être à cause de son étrange superpouvoir, mais aussi que c'est l'arbre des sages.

6 L'avenir du noyer

Notre monde globalisé fait voyager beaucoup de plantes et d'animaux et cela pose parfois des problèmes. C'est le cas pour une petite mouche arrivée en France dans les années 1980, la mouche du brou de noix. Elle ne tue pas les noyers, mais pond son asticot dans la chaire du brou et rend les noix impropres à la consommation.

7 Le superpouvoir du noyer

Avez-vous déjà remarqué que presque rien ne pousse autour d'un noyer ? C'est ça le superpouvoir du noyer : faire mourir toutes les autres plantes près de son tronc. Ses feuilles sont truffées de juglone, un composé toxique.  C'est à la juglone que le noyer doit son odeur si particulière, et c'est aussi pour cela qu'on dit qu'il ne vaut mieux pas faire de sieste sous cet arbre.

(Sources : La Salamandre et E. Grenon)

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
C
Comme je te reconnais dans ce beau texte!!!<br /> Merci du fond du cœur
Répondre
V
Très bel article !
Répondre