Couleurs de la vie
Je vous emmène en promenade. Imaginons-nous, tôt le matin, cheminer à petits pas tranquilles sur un sentier qui serpente à travers la forêt à peine éclairée par un clair-obscur. Nos pieds foulent la terre humide et souple, bousculent des touffes d’herbes odorantes, crissent et dérapent sur les pierres irrégulières, soulèvent des bouquets de sauterelles et de papillons.
Toute la force sombre de la Terre monte en nous, circule le long de nos jambes, irradie dans notre corps comme la lave d’un volcan rouge sang. Des petits coquelicots écarlates parsèment la prairie en taches vermillon. Le cerisier sauvage nous offre ses fruits rubis.
Au détour du chemin, notre regard embrasse un paysage grandiose. Assis à l’aplomb de la colline, nous découvrons le ciel orange, empourpré, strié de nuages qui virent au roux ponctué de reflets mandarine.
Le soleil se lève peu à peu et illumine la plaine de ses rayons jaune d’or. La lumière se glisse sur les toits du village, traverse le couvert des bosquets endormis, caresse les épis de blé ocre.
Reprenons doucement notre marche. Avez-vous remarqué le vert profond des aiguilles de pin qui sentent la résine tandis que nous foulons le sol sableux de la pinède, puis celui plus gris des feuilles de l’amandier, le vert printemps si tendre de l’herbe constellée de rosée ? Sortons de notre sac une pomme brillante et croquons avec gourmandise dans sa chair acidulée.
Poussons doucement la porte de la roseraie, et batifolons d’un arbuste à l’autre, caressons les pétales parfumés et veloutés. Du rouge au blanc, tout un camaïeu de rose nous enchante, fuchsia, dragée, saumon, pêche, framboise ou fraise, régal de tous nos sens en éveil.
Dans le creux du vallon, un ruisseau attire notre attention. Entendez-vous le chuintement de la cascade ? Un filet d’eau cristalline jaillit entre deux rochers, se faufile le long d’une gorge étroite. Le ciel azur plonge dans le bleu de l’eau faisant naître des reflets saphir, des gouttelettes turquoise nous éclaboussent avant de disparaître dans l’écume délavée.
Quelques tiges rampantes de pervenches se mêlent discrètement à des touffes de pensées et émaillent le bord du talus de leur violet intense. Mais une averse interrompt notre contemplation, et l’odeur de la pluie fait ressortir le parfum entêtant des lilas.
Il est temps de rentrer, le cœur rempli de tous ces plaisirs rencontrés, une chanson sur les lèvres, en enjambant joyeusement les flaques boueuses. L’arc-en-ciel nous gratifie d’un dégradé de lumière régénératrice.
Embellissons notre quotidien, fleurissons nos journées. Comme des artistes, trempons nos pinceaux dans les godets colorés de l’amour, de la passion, de l’enthousiasme, de l’espérance, de la tendresse, et de la pureté.
N’oublions pas de peindre nos émotions, affichons des couleurs éclatantes, illuminons la grisaille, rayonnons pour apporter de la joie autour de nous.
(Extraits de la Lettre de Couleur Détente de janvier 2018)